Bonjour à toutes et à tous, 

Je suis ravie de vous retrouver aujourd’hui pour le traditionnel épisode mensuel consacré à l’histoire de certains manuscrits célèbres à travers le monde ! 

Derrière cet épisode, il y a cette odeur si particulière des vieux livres, la patine que revêt leur couverture en cuir, des enluminures parfois, une écriture manuscrite souvent indéchiffrable et l’épopée séculaire du livre qui n’a pas attendu l’invention de l’impression pour voyager à travers les continents et rallier des lecteurs du monde entier. 

Dans le dernier épisode, je vous parlais du destin assez épique du manuscrit des 120 journées de Sodome du Marquis de Sade, écrit alors qu’il était emprisonné à la bastille puis recopié sur de minuscules feuillets et reliés entre eux jusqu’à composer un long rouleau de plus de 12 mètres de long ! 

Aujourd’hui, c’est le domaine du mystérieux que nous allons aborder avec un manuscrit qui reste, jusqu’à aujourd’hui, indéchiffrable. Je vous raconte l’histoire fascinante du manuscrit de Voynich ! 



Vous pouvez également écouter cet article : 

Qu'est-ce que le manuscrit de Voynich ?

Alors tout d’abord qu’est-ce que c’est que ce manuscrit ? 

En l’occurrence et contrairement à ce que son nom semblerait indiquer … L’auteur du manuscrit de Voynich n’a pas du tout été écrit par Wilfrid Voynich, qui est son découvreur en quelque sorte. En effet, ce manuscrit tire son nom de l’antiquaire qui l’a redécouvert en 1912 en Italie, Wilfrid Voynich, mais une correspondance avait déjà mentionné son existence au XVIIe siècle.

Alors oui oui oui mais quand même, avant de passer à son histoire incroyable, il faudrait déjà que vous sachiez un peu de quoi on va parler, n’est-il pas ?

Pour vous le décrire, il s’agit d’un manuscrit d’environ 230 pages sur un papier vélin de couleur ivoire. Le mystère plane sur tout son contenu car il est écrit en caractères étranges, qui ne ressemble à aucune langue connue et illustré de surprenants dessins de plantes, totalement imaginaires, de sphères célestes et de baigneuses, comprendre de femmes nues. 

À première vue, c’est-à-dire de loin, le manuscrit pourrait ressembler à un manuel d’alchimiste ou d’herboriste, à la différence près qu’il est entièrement codé. 

Sur les pages se succèdent des illustrations de plantes en grande taille, loin de la précision et de la minutie que l’on peut admirer sur d’autres manuscrits enluminés du moyen-âge ou de la renaissance : là, il ne semble pas y avoir d’économie de place, les plantes s’étalent sur la page entière, le texte s’adapte à la forme des feuilles et des fleurs dessinées, dans un joyeux désordre qui ressemble assez à ce qu’on imagine être un grimoire de sorcière. Quelques pages sont mêmes reliées entre elles et se dépliant sur plusieurs feuillets avec ce qui semblent être des calculs et positions astronomiques, on croit y reconnaitre les différentes phases de la lune, entre autre. Et puis, autour du feuillet 135, on ne sait pas trop ce qui s’est passé. L”auteur est-il parti en cacahuète dans des fantasmes personnels ou précise-t-il des indications médicales ? 

Allez savoir mais toujours est-il qu’une multitude de femmes nues apparaissent soudain et dégringolent de la page en farandole, au milieu du texte. Je précise au milieu du texte car lorsqu’il est question d’enluminure, les illustrations appuient bien sûr le texte, l’enrobent, le décorent, mais la primauté revient toujoutrs au mot. Ici, le texte doit s’adapter, ce qui est assez incongru. Aussi incongru que cette écriture cursive mystérieuse … 

Histoire du manuscrit de Voynich

La découverte

Tentatives pour déchiffrer le manuscrit

Pour l’historique du manuscrit, certains détails des illustrations semblent suggérer que l’ouvrage avait été rédigé entre 1470 et 1500, et une lettre du XVIIe siècle jointe au manuscrit indiquait qu’il avait été acheté en 1586 par l’Empereur Rodolphe II, alors roi de Bohême et prince des Habsbourg. Le manuscrit avait ensuite disparu jusqu’à ce que Voynich le redécouvre précisément en 1912. Que s’est-il passé entre temps ? C’est apparemment un mystère de plus à rajouter à la longue liste qui auréole le manuscrit de Voynich de sa brume. 

Précisons d’emblée que l’auteur du texte est inconnu, tout comme ce que dit le manuscrit à proprement parler.

En 1912 donc, Wilfrid Voynich, un libraire américain spécialiste de livres rares, fait la découverte du manuscrit dans la bibliothèque de la Villa Mandragone près de Rome. Alors qu’il ressemble à un herbier, il y a un problème de taille qui apparaît rapidement : le manuscrit était entièrement codé. 

Voynich, cet antiquaire et bibliophile polonais émigré aux états-unis, n’est pas homme à se laisser abattre : il demande alors aux meilleurs cryptographes de l’époque de décoder les caractères étranges, qui ne correspondent à aucune écriture connue. Attention spoiler : jusqu’en 2019, date de la première théorie de décryptage valable, personne n’avait été  capable de déchiffrer le manuscrit, sa nature comme son origine restent un mystère.

Plusieurs théories se sont succédées mais elles ont toutes échoué à l’épreuve des faits : 

  • On a par exemple pensé qu’un médecin de la cour de Rodolphe II aurait pu l’écrire car la page de garde du manuscrit fait apparaître une signature du nom de Jacob Tepenec qui a été effacée et qui n’a pu être découverte qu’à l’aide d’une reproduction photostatique réalisée par Voynich lui-même en 1921 mais une analyse de la bibliothèque de ce Jacob Tepenec montre qu’il signait dans ses livres sans en être l’auteur. 
  • D’autres théories ont émergées : certains ont pensé qu’il aurait été écrit par Roger Bacon, un scientifique du XIIIe siècle très en avance sur son temps mais les caractéristiques des plantes au sein du manuscrit semblent impossibles à connaître pour un scientifique du XIII, si avant-gardiste soit-il car elles supposent probablement des vues effectuées au microscope. Or, ce dernier n’était pas disponible au XIIIe siècle justement puisqu’il n’avait pas encore été inventé. 
  • Deux hypothèses, un peu fantasques, m’ont bien plues : l’une d’entre elle affirmait par exemple qu’il s’agirait d’un premier manuscrit de jeunesse écrit par nul autre que … Léonard de Vinci ! Oui, mais quand on voit les croquis du jeune Léonard et son amour pour l’écriture en miroir, cette théorie, avancée notamment en raison du tracé maladroit des silhouettes de femmes, ne tient pas. Ce cher Léonard était tout bonnement un génie depuis son plus jeune âge et trop talentueux pour avoir dessiné aussi grossièrement. 

Frustrés par tant de mystère, certains ont même affirmé que Voynich, ce fameux antiquaire qui avait découvert le livre, aurait pu lui-même céder à la tentation de la contrefaçon. Néanmoins, là encore, des analyses scientifiques effectuées sur l’encre et les pigments utilisés ont réfuté cette hypothèse. 

Devant ces échecs répétés, on a commencé à douter de l’existence d’un message à déchiffrer: après tout, le manuscrit de Voynich n’est peut-être qu’un canular sophistiqué dépourvu de sens. Une hypothèse plausible, peut-être la plus probable, serait ainsi qu’un aventurier anglais, Edward Kelley, faussaire notoire, mystique et alchimiste qui tenait un peu du savant fou se serait associé à un érudit au XVIe siècle pour monter une sorte d’immense escroquerie à l’encontre de Rodolphe II. On a ainsi des traces dans les archives d’une visite de ce fameux Edward Kelley à la cour de Rodolphe II dans les années 1580, ce qui le rend assez suspect, d’autant que l’empereur aurait acheté l’oeuvre 600 ducats, soit près de 50 000 euros actuels. 

En 2019 enfin, un cryptologue français annonçait avoir décrypté le manuscrit de Voynich : selon lui, il s’agirait tout simplement d’une abréviation du latin dans une graphie médiévale. Evidemment, comme je vous avais promis du mystère, je clôture mon enquête par ceci : la même année, en 2019, un autre chercheur à l’université de Bristol cette fois, affirmait lui aussi être parvenu à décrypter notre mystère du jour. Or, que disait-il ? Dans son étude, le spécialiste suggère que le code de Voynich serait le seul exemple connu d’un langage appelé “proto-Roman” (en anglais “proto-Romance”) ayant précédé les langues romanes comme le Français, l’Espagnol ou l’Italien. Pas grand chose à voir avec le latin abrégé donc … Par ailleurs, là où le cryptologue français semblait indiquer un recueil de médecine à l’attention de savants érudits, le chercheur de l’université de Bristol y voyait plutôt un genre de manuel pour femme, avec différents traitements, soins et recommandations relatives à la parentalité. 

Soulignons que des tentatives pour le décrypter font désormais appel à l’Intelligence Artificielle, sans succès pour l’instant. Une chose seule sûre : le manuscrit de Voynich n’est pas encore prêt à dévoiler tous ses secrets … Si jamais de fervents cryptologues et amateurs d’enquête se cachent parmi vous, sachez que le manuscrit est numérisé et accessible gratuitement sur internet ! 

Si cet article vous a plu, peut-être que ceux-ci vous plairont aussi :

Et pour trouver le manuscrit de Voynich en pdf ou numérisé, je vous conseille d’aller faire un tour par ici : 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *