Bonjour à toutes et à tous,

Cette semaine, dans cette anecdote du jour, il y sera question non seulement de littérature, mais également d’enquête policière, et … Du vol de la Joconde ! 

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Car oui, l’inestimable chef d’œuvre de Léonard de Vinci a déjà été volé, au Louvre bien sûr et ce, en 1911. Cela paraît assez fou quand on sait de quelle surveillance Mona Lisa fait l’objet de nos jours : quiconque vient au Louvre pour l’admirer, déjà doit se presser au sein d’une foule assez dense mais en plus l’admirer derrière une vitre. Imaginer le vol du plus célèbre tableau du monde est dès lors assez contre intuitif. Cela dit, n’imaginez pas qu’en 1911, Mona Lisa était inconnue au bataillon, loin de là. Elle était déjà célébrée sur la planète et attirait déjà chaque année une foule de curieux. 

C’est ainsi assez compréhensible que, lorsqu’en 1911, on s’aperçoit que le tableau a disparu, eh bien l’affaire fisse grand bruit. Mais le plus fou, c’est sans doute qu’il faudra deux ans avant que le tableau soit retrouvé et qu’en plus de cela, une seule personne sera amenée en garde à vue et accusée, à tort bien sûr, de son vol : Guillaume Apollinaire. 

Guillaume Apollinaire, c’est ce poète dont vous connaissez sûrement ce poème, Le pont Mirabeau

Mais comme toujours, avant de se pencher sur l’anecdote littéraire, répondons déjà à la question brûlante : qui est Guillaume Apollinaire ?

Biographique de Guillaume Apollinaire (version courte)

Guillaume Apollinaire avant la poésie

Guillaume Apollinaire, eh bien, vous vous en doutez, n’est qu’un nom de plume et pour cause, il a dû avoir pitié de ses compatriotes puisqu’il s’appelait en réalité Guillaume Albert Vladimir Alexandre Apollinaire de Kostrowitzky. On comprend qu’il ait voulu nous faciliter la prononciation et rendre son patronyme plus audible pour nous autres français. 

Celui qui est né sujet polonais de l’empire russe pour reprendre la formule, le 26 Août 1880 à Rome avant de mourir de la grippe espagnole le 9 novembre 1918 à Paris, fut entre temps poète, je l’ai déjà dit mais également critique et théoricien d’art, journaliste et écrivain. 

Après une enfance qui oscille entre aventure et errance, puisque sa mère, Angelika Kostrowicka qui se fait ensuite appeler Olga de Kostrowitzky les fit voyager de Rome à Monaco puis à Nice, Guillaume Apollinaire s’installe à Paris en 1900 où il devient d’abord employé de banque. Dès 1901, il commence à écrire ses premiers poèmes et ses articles qui fleuriront ensuite dans des journaux satiriques et revues diverses jusqu’à ce qu’en 1903, il crée un mensuel dont il est rédacteur en chef, Le festin d’Ésope, revue des belles lettres, où il publiera des poèmes et partagera les pages avec d’autres noms de l’avant-garde littéraire de l’époque dont Alfred Jarry pour ne nommer que lui. 

Guillaume Apollinaire et l’avant-garde artistique

 A partir de 1907, il commence à vivre de sa plume et se lie d’amitié avec Picasso,, André Derain, le Douanier Rousseau, pour ne citer qu’eux et se fait un nom de poète et de journaliste  de conférencier et de critique d’art à la revue L’Intransigeant

Outre son passage en prison en 1911 sur lequel je reviendrai juste après, il s’engage en 1914 dans l’armée française, en hommage à sa patrie d’adoption, c’est d’ailleurs grâce à cela que sa procédure de naturalisation française sera enfin acceptée. Juste avant de faire ses classes, il rencontre Lou à Nice, de son vrai prénom Louise de Coligny-Châtillon, dont il tombe éperdument amoureux et qui nous vaudront de magnifiques poèmes qu’il lui adresse au dos des lettres qu’il lui écrira durant la guerre, au coeur des tranchées. 

Le 9 mars 1916, il obtient sa naturalisation française mais quelques jours plus tard, le 17 mars 1916, il est blessé à la tempe par un éclat d’obus.

La mort de Guillaume Apollinaire

Proche des artistes avant-gardistes de son temps, il crée en 1917 le néologisme de surréalisme et continue d’écrire, en parallèle de sa convalescence. Affaibli par sa blessure, Guillaume Apollinaire meurt le 9 novembre 1918 chez lui à l’âge de 38 ans, au 202 boulevard Saint-Germain, à Paris. C’est la grippe espagnole qui l’a emporté en une ultime asphyxie. Alors que ses amis viennent saluer sa dépouille, les Parisiens défilent sous ses fenêtres en criant « À mort Guillaume ! », faisant référence non au poète mais à l’empereur Guillaume II d’Allemagne qui a abdiqué le même jour. Il est enterré au cimetière du Père-Lachaise.

On le voit, il eut une vie brève mais tumultueuse, ce qui nous ramène d’ailleurs à un épisode qui a profondément marqué sa destinée : son passage en garde à vue. 

Guillaume Apollinaire, accusé du vol de la Joconde

Pour cela, il me faut faire un retour en arrière, précisément le 21 août 1911, alors qu’un gardien au Louvre découvre à sa grande stupeur que La Joconde, peinture célébrissime, a été dérobée. 

La police s’empare de l’affaire, hautement médiatique et entend bien lever la brume qui plane sur l’enquête. 

En 1911, Guillaume Apollinaire n’est pas encore connu, il reste très confidentiel et seulement plébiscité par le cercle artistique parisien, donc un milieu lettré certes, mais relativement fermé. 

Or, pour son plus grand malheur, le poète connaît et a côtoyé d’assez près un homme prénommé Géry Pieret, homme désormais oublié de l’histoire mais qui alors était connu pour avoir volé, au Louvre précisément, des statuettes ibériques qu’il avait ensuite offert à Picasso pour des études cubistes. Apollinaire ayant soutenu haut et fort Picasso et l’art cubiste qui faisait alors scandale, il n’en faut pas beaucoup plus à la préfecture de police pour tirer des conclusions hâtives. 

Il est vrai que dans les milieux journalistiques, la mauvaise surveillance du patrimoine français fait souvent les gros titres, thème que reprend justement Apollinaire qui pense à un canular dans un de ses articles. Tout comme le dit un rapport de la police le 23 août 1911 qui pense à un artiste impertinent ou à un journaliste pour un canular qui aurait volé la Joconde pour décrier sa mauvaise surveillance. 

La garde à vue de Guillaume Apollinaire

Le 7 septembre, le nom d’Apollinaire, remonte jusqu’à la police qui vient le perquisitionner à son domicile à Auteuil et l’emmène en garde à vue. On ne sait pas précisément qui l’a dénoncé car son dossier a été effacé des archives de la police, mais Apollinaire y passera 5 jours, les forces de l’ordre étant convaincues que le poète est coupable de son vol. 

Pendant ces cinq jours, il écrira 5 poèmes pour passer le temps et oublier son désespoir. En parallèle, les intellectuels parisiens volent à son secours et s’indignent de son arrestation au sein de toute la presse et d’une pétition qui parle d’arrestation arbitraire, de chaos policier arrêtant d’éminents poètes et met en péril la dignité des écrivains. Le 12 septembre 1911, Guillaume Apollinaire est appelé par le juge d’instruction et est ensuite relâché. 

Le dénouement : mais qui avait vraiment volé la Joconde ?

Finalement, deux ans plus tard, en 1913, le voleur de la Joconde sera retrouvé. Il s’agissait d’un ouvrir italien, Vincenzo Perugia qui avait travaillé au Louvre comme vitrier. Enervé de constater que le tableau de Léonard de Vinci n’était plus en Italie, ce que Vincenzo considérait comme un outrage à sa patrie et un vol de patrimoine alors que le tableau avait été acheté à Léonard en bonne et due forme par François Ier pour 4 000 écus d’or.

Le voleur avait caché la Joconde dans sa chambre pendant deux ans, avant de le proposer contre 500 000 lires à Alfredo Geri, un antiquaire basé à Florence. Ce sera ce dernier qui examina le tableau le 11 décembre 1913 en compagnie du directeur du musée des Offices. Les deux hommes prévinrent la police et c’est ainsi que la Joconde regagna en grande pompe sa galerie au Louvre où elle fait désormais, depuis plus d’un siècle, le bonheur d’une foule de curieux, amateurs d’art de près ou de loin.

Alors, la prochaine fois que vous irez au Louvre admirer la Joconde, ayez une petite pensée pour ce poète qui paya son amour de l’art d’un lourd tribut. 

👉Les sources de l’article :

Photo en noir et blanc du poète Guillaume Apollinaire et description de l'épisode de podcast
Image du podcast Les dessous de la littérature à propos de l'épisode sur Guillaume Apollinaire

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